IA et automatisation : Des outils qu’il ne faut pas craindre
IA et automatisation ne doivent pas être diabolisées. Elles ne sont pas prêtes à remplacer entièrement l’homme sur le marché du travail. Mais encore faut-il éviter l’obsolescence des compétences.
Bien qu’elles concernent chacune des tâches d’un ordre différent, l’IA et l’automatisation marquent déjà de leur empreinte de nombreux métiers, bouleversant parfois leurs modes de fonctionnement . « Rien que le secteur RH a dû s’adapter à ces technologies », explique Giseline Rondeaux, chercheuse senior au Lentic (HEC-ULg). « L’intervention technique, les métiers de la relation client et du marketing et même une part non négligeable du processus de sélection et de recrutement (automatisation des échanges, tri des CVs,…) des candidats peut aujourd’hui être réalisée grâce à des machines ». Mais à quel point ces nouveautés technologiques ont-elles un impact dans le monde du travail ?
Cette évolution rapide a toujours alimenté les débats et voit l’humain être définitivement remplacé par le robot dans certains secteurs. Ce n’est pourtant pas la conclusion à laquelle sont arrivées plusieurs études récentes sur le sujet. Même s’il est clair que ce type de technologies modifie les tâches des travailleurs, les compétences métiers de ceux-ci resteraient importantes. « La réponse apportée par l’IA ne s’appliquera effectivement pas dans certaines situations », poursuit la chercheuse. « Sans oublier que la machine ne remplacera jamais complètement les soft skills comme l’empathie, l’instinct ou l’interprétation de la gestuelle et du non-verbal ».
L'automatisation ne remplacera jamais les soft skills comme l’empathie, l’instinct ou l’interprétation de la gestuelle et du non-verbal.
Les experts imaginent plus une transformation qu’une réelle disparition ou apparition de certains métiers. « Même si cela dépend du pays », nuance Amélie Alleman, fondatrice de Betuned. « Par exemple, une étude américaine a montré que 48% des entreprises qui ont adopté ChatGPT ont déjà procédé à des licenciements. Alors qu’en Europe et en Belgique, c’est moins clair. Mais cette analyse a ses limites car, si on est honnête, on ne connaît pas encore les conséquences réelles de son impact ». Cette mutation sera également plus marquée dans certains métiers et pour certaines tâches. « Les tâches répétitives et sans valeur ajoutée seront bien entendu le plus impactées ».
Mais dans l’ensemble, rien ne sert de céder à la panique. « Nous revivons actuellement les craintes qu’avaient pu vivre les secrétaires lors de l’apparition de l’ordinateur», rappelle Giseline Rondeaux. « Au final, elles ont simplement dû s’adapter et devenir des assistantes de direction plutôt que des spécialistes du traitement de texte ». Aujourd’hui, croire que des Data Scientists remplaceront un jour l’ensemble des travailleurs dans n’importe quel secteur n’est pas réaliste.
Ce glissement ne se fera cependant pas tout seul. Les entreprises comme les travailleurs doivent prendre des mesures pour éviter l’obsolescence de leurs compétences. « Le point de départ est avant tout de comprendre que ces technologies ne doivent rester que de simples outils », poursuit Amélie Alleman. « Intégrées dans le processus de travail, elles offrent un gain de temps et permettent de se focaliser sur d’autres activités, augmentant dès lors la valeur ajoutée ». Il est également important de garder en tête que cette mutation intensifie la charge mentale des tâches concernées en les rendant plus pointues. Ce qui aura, à coup sûr, une influence sur le bien-être des travailleurs. « Des évolutions dans le mode de fonctionnement doivent être mises en oeuvre », poursuit Giseline Rondeaux.
« Ce n’est pas avec un simple manuel vidéo que l’on familiarisera ses collaborateurs à cette nouvelle technologie. La présence de Key Users est par exemple indispensable ». Enfin, les deux expertes soulignent un point crucial pour que cette transition fonctionne : l’information claire et précise des entreprises vers leurs employés. « Ils doivent être rassurés concernant les finalités assignées aux technologies introduites et les impacts pressentis sur leur fonction », estime Giseline Rondeaux. L’experte préconise ainsi de remplacer les craintes de licenciements par des plans concrets de formation et/ou de requalification. Après tout, la technologie doit toujours être vue comme une opportunité.