Energie

Être nucléaire ou ne pas l’être ?

07.12.2023
par Bastien Craninx

La Belgique s’interroge sur l’avenir du nucléaire dans sa transition énergétique. Stop ou encore ? Qu’apporte cette source d’énergie à notre pays ? Entre nécessité et défi, le débat oppose le MR, Ecolo et le PS.

nucléaireGeorges-Louis
Président du MR

Le nucléaire est-il une source d’énergie qui peut, à votre avis, contribuer positivement à l’avenir énergétique durable de la Belgique ?

Le nucléaire ne “peut” pas être une source d’énergie pour la Belgique, il doit l’être ! C’est d’ailleurs ce que le Mouvement Réformateur (MR) prévoit dans son mix énergétique pour un avenir décarboné. Le seul mix crédible et idéal est un mix qui trouve son équilibre entre le nucléaire et d’autres énergies renouvelables. La plupart des autres sources d’énergies renouvelables n’émettent pas de CO2, mais n’ont qu’une production intermittente. Le nucléaire, quant à lui, offre une production constante, essentielle à l’approvisionnement continu. En France, ce modèle a permis d’atteindre 97 % de décarbonation, montrant que la combinaison nucléaire-renouvelable est efficace.

Quels sont les principaux avantages du nucléaire en termes de durabilité positive pour la Belgique ?

D’abord, il ne produit pas de CO2, et répond ainsi au défi climatique majeur de réduction des émissions. De plus, bien que son infrastructure nécessite des investissements significatifs en béton, ceux-ci sont amortis sur une longue période. La technologie nucléaire permet également une gestion efficace des déchets, qui sont minimes et peuvent être traités, réduisant ainsi la nécessité de filières de traitement étendues. L’uranium est économique, représentant moins de 5 % du coût total, et son extraction est simple. Il n’y a pas de dépendance critique vis-à-vis d’autres nations, car il est disponible en Australie et au Canada, des démocraties stables.

Quels sont les principaux défis ou préoccupations qui y sont associés ?

Premièrement, il est nécessaire de revitaliser la filière nucléaire qui a été négligée, avec de nombreux ingénieurs se tournant vers d’autres industries ou pays. Il est impératif de relancer la formation et de soutenir la recherche. Ensuite, il faut maintenir les chantiers nucléaires en activité, ce qui demande une décision politique rapide et déterminée quant à leur implantation. Enfin, il est crucial de gagner la confiance des investisseurs afin de lever des capitaux privés, notamment avec le soutien des banques et des garanties étatiques.

nucléaireÉlodie Belleflamme
Conseillère Énergie-Climat du Centre Jacky Morael (Ecolo)

Le nucléaire est-il une source d’énergie qui peut, à votre avis, contribuer positivement à l’avenir énergétique durable de la Belgique ?

Eu égard au retard accumulé par les précédents gouvernements, le nucléaire joue encore un rôle dans le mix énergétique en transition, mais sa contribution climatique est faible. Chaque année, la Belgique émet l’équivalent de 110 millions de tonnes de CO2 et les réacteurs nucléaires allègent notre dette carbone d’à peine 1 million de tonnes. Seul un horizon 100 % renouvelable, accompagné de mesures structurelles adéquates, permettra d’atteindre la neutralité carbone.

Quels sont les principaux avantages du nucléaire en termes de durabilité positive pour la Belgique ?

Lorsqu’on compare le nucléaire à ses alternatives en termes de coût et de rapidité, le nouveau nucléaire et la majorité du nucléaire existant n’a aucun avantage. Avec un dollar investi dans du nucléaire, on produit 3 à 13 fois moins d’énergie qu’en investissant dans les énergies renouvelables. Investir dans des mesures de réduction de la consommation, notamment en termes d’efficience, s’avère encore plus rentable. Et alors que le « nouveau nucléaire » ne sera pas disponible avant 2045, les énergies renouvelables et l’efficacité ne prennent que quelques années à se déployer, et peuvent l’être dès aujourd’hui.

Quels sont les principaux défis ou préoccupations qui y sont associés ?

Pour relever les enjeux environnementaux et énergétiques de cette décennie, nous devons surtout nous concentrer sur la rénovation énergétique à grande échelle des bâtiments, favoriser une transition vers des modes de transport plus durables, électrifier les procédés industriels pour réduire les émissions et garantir un accès à une énergie propre en abondance. Cette dernière doit être proposée à un coût stable et accessible pour tous. Ce ne sont pas de simples changements, mais une révolution nécessaire des infrastructures, des habitudes et des politiques. Mettons en œuvre ces solutions de manière proactive pour forger un avenir durable.

énergieBen Achour
Député PS

Le nucléaire est-il une source d’énergie qui peut, à votre avis, contribuer positivement à l’avenir énergétique durable de la Belgique ?

Les trois objectifs à poursuivre sont les émissions carbone, la sécurité d’approvisionnement et l’accessibilité des prix. En raison de la guerre en Ukraine, de l’augmentation des prix, de l’incertitude de l’approvisionnement en gaz, les réacteurs nucléaires les plus récents ont été prolongés. En cela, le nucléaire contribue positivement à l’avenir énergétique de notre pays. Toutefois, cette technologie n’est pas une source d’énergie idéale. Elle présente également des inconvénients significatifs. L’avenir du nucléaire en Belgique dépendra des avancées technologiques, et de leurs avantages concrets pour les citoyens, particulièrement sur les small modular reactors (SMR), le “nucléaire du futur”.

Quels sont les principaux avantages du nucléaire en termes de durabilité positive pour la Belgique ?

Premièrement, il s’agit d’une source d’énergie pilotable, qui peut s’adapter à la demande et permettre à ce titre l’intégration des énergies renouvelables au mix énergétique. Deuxièmement, le nucléaire n’entraîne l’émission que de faibles quantités de CO2 : en moyenne 12 grammes d’équivalent C02 par kWh d’électricité produite (de 3,7 à 110 gCO2eq/kWh) selon le GIEC. Troisièmement, la production d’électricité nucléaire permet à la Belgique une relative autonomie pour assurer son approvisionnement. À noter toutefois que l’entièreté de l’uranium utilisé dans les centrales belges est importée, notamment de Russie.

Quels sont les principaux défis ou préoccupations qui y sont associés ?

Les défis en matière de sécurité d’approvisionnement, de pouvoir d’achat et de climat nous imposent des réponses à court et moyen terme. Or, construire de nouvelles centrales ou prolonger les plus vieux réacteurs n’est pas une solution pour les prochains hivers, en raison des risques de blackout liés à des problèmes de maintenance ou de microfissures, comme c’est le cas en France actuellement. Les déchets resteront radioactifs plusieurs centaines de milliers d’années : un fardeau pour les générations futures. En Belgique, il est impossible d’installer des centrales loin des zones habitées. De nouveaux réacteurs seraient véritablement contraignants pour les riverains. Il faut le prendre en compte.

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