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Energie

Biomimétisme : quand la nature inspire les architectes

07.12.2023
par Caroline Beauvois

Rendre nos habitations autosuffisantes, plus durables, mais aussi plus résilientes, voici l’objectif du biomimétisme en architecture. En effet, qui de mieux que la nature pour nous donner l’exemple ?

S’inspirer de la nature pour développer le progrès technique. Si le phénomène n’est pas nouveau, c’est à la fin des années 90 et après la crise écologique que le biomimétisme commence à s’inviter dans les pratiques, explique Shady Attia, professeur d’architecture durable et de technologie du bâtiment à la faculté des Sciences appliquées de l’Université de Liège. « L’humain a toujours essayé de se connecter avec la nature et de s’en inspirer — Gaudi s’en est largement inspiré pour construire la Sagrada Familia à Barcelone — mais ce phénomène n’a été articulé très clairement qu’à partir de 1997, par la scientifique Janine M. Benyus, dans son livre “Le Biomimétisme”. »

Mais de quoi s’agit-il exactement ? 

« Le biomimétisme est une conception multidisciplinaire utilisant la nature comme source d’inspiration pour l’esthétique, mais aussi la structure, la fonction, le confort et la durabilité. » Concrètement, les architectes cherchent à imiter trois caractéristiques de la nature dans leurs conceptions biomimétiques : l’interdisciplinarité, l’adaptation et l’absence de déchets. À l’international, L’Esplanade Theatre à Singapour, l’Eastgate Building au Zimbabwe ou encore The Algae House en Allemagne sont des exemples de constructions biomimétiques impressionnantes. En Belgique, bien que les architectures totalement biomimétiques soient rares, le concept s’intègre largement à certains éléments, notamment par la végétalisation des toitures et des façades. Autres exemples : les cellules photovoltaïques intégrées dans le vitrage, les peintures hydrofuges copiant les caractéristiques des plantes, les façades dynamiques qui réagissent selon les saisons…

Luc Schuiten, architecte et dessinateur belge engagé, mène depuis plus de 40 ans une réflexion sur les cités végétales et le biomimétisme dans l’architecture. Son nouveau livre “Un monde biomimétique” sort d’ailleurs en janvier prochain. « Cette réflexion vise à démontrer que la nature est notre mentor. Elle nous offre toutes les solutions pour préserver la planète et collaborer harmonieusement avec le vivant », témoigne-t-il. « Nous sommes de plus en plus conscients du rôle négatif que nous jouons sur notre environnement. Ici, il s’agit de voir quelles sont les possibilités à développer pour continuer à avancer intelligemment avec l’ensemble du vivant. »

Mais si ces constructions sont particulièrement impressionnantes, leur entretien l’est tout autant, alors que la modernisation implique le contraire… « En Belgique, et en Europe en général, l’architecture est très standardisée et doit suivre de nombreux règlements ; le biomimétisme est dès lors difficile à appliquer. Par ailleurs, le biomimétisme dans l’architecture nécessite des budgets conséquents. », signale Shady.

La nature est notre mentor.

- Luc Schuiten, Architecte et dessinateur spécialisé dans le biomimétisme

Exemple de résilience

Bien que nous ne puissions pas éviter les conséquences du changement climatique, la nature reste notre meilleur modèle de résilience. Gel, tempête, vagues de chaleur et de froid extrêmes, coupures d’électricité : il faut vivre avec ces scénarios de chocs qui seront très fréquents. Il est nécessaire de s’adapter pour être résilient et pouvoir rebondir après chaque choc. Le professeur poursuit : « C’est à cela qu’on essaye de préparer l’architecture. On observe un certain dynamisme et une adaptation, avec notamment la domotique et le concept de bâtiments intelligents, adaptatifs ou adaptables. Côté matériaux, le béton et l’acier laissent place aux matériaux biosourcés comme le bois, le chanvre ou les laines naturelles. Nous sommes vraiment en pleine transition ! » Et l’architecte de conclure : « Notre environnement naturel est celui du vivant ; plus on s’en entoure et interagit avec, mieux on se porte. »

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