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Diversité

Idéaux de beauté : Le bon look, la mauvaise époque ?

03.05.2023
par Kim Beerts

Des courbes de Marilyn Monroe aux top-modèles maigres des années 90, en passant par les Kardashian, chaque époque a ses standards de beauté. Alors que les films et les défilés de mode dictaient autrefois le « bon look », les médias sociaux définissent aujourd’hui la façon dont nous « devrions » être. Cela devient de plus en plus irréaliste, avertissent les experts.

Les critères de beauté changent. Chaque époque, chaque lieu et chaque culture a ses propres idéaux de beauté. Il y a 20 ans, la femme occidentale « idéale » était très mince, à l’image de Kate Moss. Aujourd’hui, les clips musicaux sont presque toujours remplis de fessiers généreux. 

Le professeur Laura Vandenbosch, spécialiste des médias et de l’image corporelle à la KU Leuven, nous explique que nos standards de beauté sont formatés depuis notre plus jeune âge. « Pensez aux contes de fées, dans lesquels les héros sont toujours beaux, alors que le méchant ou la sorcière est toujours laid, vieux ou bizarre. » Les livres, comme la télévision, façonnent l’idéal de beauté de nos foyers. « Malgré le casting plus diversifié dans les séries récentes, le personnage principal est toujours très mince, beau et épanoui. Pourtant, plus de 45 % de la population n’est pas mince et n’est donc pas représentée ». Les médias sociaux comme TikTok et Instagram, en raison de la place centrale donnée aux images, mettent davantage l’accent sur les normes de beauté. « Pour certains, c’est un cercle vicieux : dans la « culture du selfie », ils sont focalisés sur leur apparence, suivent des influenceurs qui publient beaucoup sur leur apparence, ce qui les incite également à poster plus de selfies et les focalise encore plus sur leur apparence. »

Une beauté malléable

L’idéal de beauté actuel, taille de guêpe et ventre rebondi, a été lancé par la star de la téléréalité Kim Kardashian. Son corps, mais aussi sa peau lisse, ses yeux de chat et ses lèvres pulpeuses sont devenus la norme pour Instagram. Comme peu de gens possèdent naturellement cette apparence, les filtres sont apparus. Mais cela n’est pas sans conséquence, prévient le professeur Vandenbosch : « Des recherches menées auprès d’adolescents flamands montrent que ceux qui utilisent des filtres pour le visage sont plus ouverts à la chirurgie plastique et pensent que cela leur assurera une meilleure acceptation d’eux-mêmes et une plus grande popularité. »

L’idée que la beauté est façonnable et que le reste de notre vie l’est aussi se développe. « Nous parlons d’un idéal malléable et médiatisé : on nous suggère l’idée que nous pouvons passer de rien à tout. Nous contrôlons notre beauté et, par conséquent, notre sociabilité, notre intelligence et notre réussite ».

27 % des jeunes se sentent peu sûrs d'eux lorsqu'ils commencent à se comparer.

- Laura Vandenbosch, KU Leuven

Le bien-être mental

Les idéaux de beauté ne sont plus la « beauté » biologique, mais une image totalement travaillée et de moins en moins accessible. Et cela se ressent. « On se compare aux autres avec la “photo parfaite” sur les réseaux sociaux », explique le professeur Vandenbosch. « Ce n’est pas forcément négatif. On peut aussi s’en inspirer mais la recherche montre malgré tout que 27 % des jeunes se sentent peu sûrs d’eux lorsqu’ils commencent à se comparer. Bien que nos jeunes sachent analyser les médias sociaux de manière critique (ils savent que ce qu’ils voient en ligne n’est pas toujours réel ou réaliste) ces images leur renvoient souvent une image négative. »

Parce que de telles émotions sont dangereuses pour le bien-être mental, la KU Leuven, en collaboration avec la plateforme pour la jeunesse WAT WAT et le centre de connaissances Mediawijs, a lancé la campagne d’information « Vibe Check », qui conscientise les jeunes aux dérives des médias sociaux. Parallèlement, des images de plus en plus réalistes apparaissent sur les plateformes en ligne. Des célébrités telles que Chrissy Teigen, Rihanna, Lady Gaga ou, dans le cas des hommes, Romelu Lukaku, ont déjà montré leurs vergetures sur Instagram. Une évolution positive, selon le professeur Vandenbosch : « L’amour et l’acceptation de chacun devraient être encouragés, même si la tendance du body positive est encore trop souvent promue par des personnes peu différentes de la norme. En fait, nous avons trop peu de célébrités aux looks diversifiés ».

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Normaliser

Morgane Gielen prouve qu’il est possible d’utiliser plus souvent des images non stéréotypées. Il y a un an et demi, la photographe a fondé No Babes Agency, une agence de mannequins inclusive composée de personnes hors norme: petites, grandes tailles, tatouées, en fauteuil roulant, avec du vitiligo, un handicap mental… « En Amérique et à Londres, ils ont de l’avance. En Belgique, les entreprises commencent à voir l’importance de la diversité », souligne Morgane Gielen. Mais le chemin à parcourir est encore long. Souvent, on se contente d’une personne « de couleur » ou « avec une taille en plus ». Il s’agit d’une démarche symbolique qui relève plus du marketing que de la conviction. La diversité consiste souvent à montrer que le mannequin s’écarte de la norme, alors qu’il devrait être normal. Morgane Gielen se résigne : « Plus nous normalisons les choses, plus cela devient normal. Dans quelques années, une agence comme la nôtre deviendra, je l’espère, la norme et tout le monde pourra s’identifier aux mannequins qui sont simplement eux-mêmes. »

Les standards de beauté peuvent-ils vraiment changer ? « C’est merveilleux de promouvoir la diversité et l’authenticité. Mais il faut veiller à ce que cela ne devienne pas le seul idéal à atteindre », souligne le professeur Vandenbosch. « Le meilleur conseil ? Prenez vos distances par rapport à cet idéal et concentrez-vous non pas sur votre apparence, mais sur vos capacités. Ce serait formidable que la génération actuelle d’enfants grandisse avec cette vision ».

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