cancer du côlon
Santé

« Quand l’adversaire est un cancer du côlon, on n’est jamais trop ambitieux »

12.03.2021
par Fokus Online

« Les personnes se prêtant au dépistage du cancer du côlon sont encore trop peu nombreuses. Et ce alors que le taux de survie est de plus de 90 % lorsque la maladie est décelée à temps. » C’est sur ce constat alarmant que le Dr Luc Colemont attire notre attention en ce début du mois international du cancer du côlon. La Commission européenne émet encore un avertissement supplémentaire : 40 % de tous les cancers pourraient être évités grâce à une meilleure hygiène de vie et à un meilleur dépistage. Un appel à prendre soin de soi et à se faire tester.

La prévention et l’information

Le cancer de l’intestin touche 1 Belge sur 20. Chaque jour, 23 personnes sont diagnostiquées et 10 patients décèdent de la maladie. Ce qui en fait l’un des cancers les plus répandus dans notre pays. « Inacceptable dans l’État-providence moderne que nous prétendons être », déclare sévèrement Luc Colemont. Il est un spécialiste du cancer du côlon.

Avec son ASBL Stop Darmkanker (Stop Cancer Côlon), il lutte contre la maladie depuis plusieurs années. Maintenant avec, pour armes principales, la prévention et l’information. « Le cancer de l’intestin peut parfaitement être décelé à un stade précoce. Il répond en effet à tous les critères fixés par l’Organisation mondiale de la santé en la matière. C’est fréquent, il touche aussi bien les hommes que les femmes. Il est facile à déceler au moyen d’un test fiable… Et vous avez en outre toutes les raisons de le faire. Le plus tôt le diagnostic est posé, plus vos chances de guérison sont élevées. »

La grande majorité des cancers de l’intestin commencent par un polype qui, dans 1 à 5 % des cas, se transforme en tumeur. Un processus qui peut s’étendre sur quelques années, généralement sans produire le moindre symptôme. « Si le cancer du côlon est détecté au stade le plus précoce, le taux de guérison est de plus de 90 %. Mais ce taux diminue au fur et à mesure que la maladie progresse. D’où l’importance du dépistage précoce. En Belgique, qui s’effectue par un prélèvement des selles », explique le Dr Colemont.

Trop peu d’examens

Tous les deux ans, plus de 850 000 Flamands âgés de 50 à 74 ans sont invités à passer un tel test pour le dépistage du cancer du côlon. En 2019, seuls 51,1 % se sont prêtés au test. Les stratégies de dépistage varient d’une région à l’autre. Dans la partie francophone du pays, les statistiques chutent à moins de 20 %. « C’est beaucoup trop peu », soupire le Dr Colemont. « Quand l’adversaire est un cancer du côlon, on n’est jamais trop ambitieux. Aux Pays-Bas, ils atteignent les 70 %. Nous devrions donc nous rapprocher de ce chiffre. Je serais déjà heureux d’atteindre les 60 %. »

Toutefois, ce taux de dépistage plus élevé ne sera pas pour cette année. Bien que les chiffres pour 2020 n’aient pas encore été publiés. Le Dr Colemont n’a pas de trop grandes attentes. Les examens ont non seulement été interrompus pendant environ deux mois pour la population. Mais la COVID-19 a également réduit l’attention portée aux autres maladies. « Au cours du premier semestre 2020, on a diagnostiqué 20 % de cancers du côlon en moins.

Ces cancers n’ont pas disparu, ils n’ont tout simplement pas été dépistés. Cela est en partie dû au report des soins réguliers et à la crainte d’aller à l’hôpital. La maladie peut passer sous le radar pendant quelques mois. Mais au bout de huit mois, on atteint le point de basculement où un cancer du côlon qui était initialement parfaitement traitable par chirurgie nécessite également une chimiothérapie. Voilà où nous en sommes. »

Pas étonnant qu’en cette période de crise sanitaire, le Dr Colemont ne cesse de proclamer encore plus fort. « Faites – le – test ! Vous disposez gratuitement d’une possibilité de sauver des vies et d’éviter la souffrance. Saisissez-la ! Je ne le dirai jamais assez. »

Plus tôt le diagnostic est posé, plus vos chances de guérison sont élevées.

Plan de lutte contre le cancer

Un diagnostic précoce est d’une importance vitale : comme le dit la vieille sagesse populaire. Il vaut mieux prévenir que guérir !

Le cancer est une maladie dont les cellules se divisent et se propagent de manière inattendue et chaotique dans notre organisme. Cela est en partie dû à des facteurs génétiques, hors de notre contrôle. Mais aussi à d’autres facteurs que nous pouvons bel et bien influencer. La recherche scientifique montre que jusqu’à 40 % de tous les décès par cancer pourraient être évités grâce à un mode de vie plus sain, à des dépistages plus nombreux et plus complets et à un diagnostic plus précoce. Si l’on se focalise sur les chiffres spécifiques à la Belgique, une étude réalisée en 2019 par le Centre international de recherche sur le cancer indique que nous pouvons éviter 36 à 43 % des cancers chez les hommes. Chez les femmes, 53 à 58 % des cancers en changeant notre mode de vie.

Menace majeure dans notre partie du monde

Toutefois, chaque année, un cancer est diagnostiqué à 2,6 millions d’Européens. Cela représente un peu plus d’un quart de tous les cancers recensés à l’échelle de la planète. Alors même que moins de 10 % de la population mondiale vit en Europe. Le cancer constitue donc une menace majeure dans notre partie du monde. Environ 1,3 million d’Européens en meurent chaque année. Ce qui en fait la deuxième cause de décès la plus fréquente après les maladies cardiovasculaires. Sans mesures concrètes, l’Europe craint que le nombre de patients atteints de cancer n’augmente de 25 % au cours des 15 prochaines années. Et ne devienne la principale cause de décès d’ici 2035.  

Ces mauvaises perspectives ont incité la Commission européenne à lancer un plan européen de lutte contre le cancer. Elle prévoit des ressources non seulement pour le diagnostic et le traitement du cancer. Mais aussi pour la prévention et la détection précoce. 

cancer du côlon

Une bonne hygiène de vie

Bien qu’une bonne hygiène de vie ne constitue pas une garantie absolue de prévention du cancer. La science affirme qu’elle contribue à augmenter les chances de vivre longtemps et en bonne santé. Les recherches montrent ainsi qu’il existe un lien entre l’alimentation et plusieurs cancers, dont le cancer du côlon, du foie et de l’estomac. Même si certaines hypothèses à ce sujet doivent encore être étayées. Ce qui a été démontré de manière irréfutable. C’est que l’exercice physique a un effet protecteur vis-à-vis du cancer et favorise également le rétablissement après la maladie.

L’exercice physique stimule notre système immunitaire. Ce qui constitue une excellente défense contre les 300 à 1 000 cellules cancéreuses qui sont créées dans notre corps chaque jour. Un organisme en bonne condition ne se contente pas de décomposer efficacement ces cellules malignes. Mais favorise également une division cellulaire saine. 

Autre point sur lequel la science s’accorde : l’effet néfaste de l’alcool. Une consommation excessive d’alcool augmente le risque de divers cancers, tels que le cancer du côlon, du sein et du foie. Dans le monde, les cancers liés à l’alcool représentent 5 % de tous les nouveaux cas et 4,5 % de tous les décès annuels. Seuls l’obésité et le tabagisme pèsent encore plus lourd comme déclencheurs de cancer.

Il n’est donc pas surprenant que la Commission européenne consacre une partie de son budget de lutte contre le cancer à des campagnes de sensibilisation axées sur une bonne hygiène de vie. L’objectif de la Commission est de réduire de 10 % la dépendance à l’alcool des citoyens de l’UE. Et de faire passer de 25 % à 5 % le nombre d’Européens qui fument. 

En fait, nous devrions traiter notre organisme comme nous traitons notre voiture : procéder à un contrôle chaque année. 

Faites – Le – Test !

Bien avant la Commission européenne, l’Organisation mondiale de la santé a également énuméré douze bonnes résolutions pour nous prémunir du cancer. 

« Les plus importants sont les deux feux rouges – ne pas fumer et ne pas consommer de l’alcool de façon excessive. Et les trois feux verts : faire suffisamment d’exercice physique, avoir une alimentation variée et maintenir un poids sain », résume le Dr Colemont. « C’est on ne peut plus recommandé, car une bonne hygiène de vie réduit le risque de cancer du côlon de 20 %. » 

Un cancer sur trois étant déclenché par une mauvaise hygiène de vie, de petites modifications de notre alimentation et de notre mode de vie peuvent déjà faire une grande différence. Par exemple, selon des études de l’Organisation mondiale de la santé. Le simple fait de veiller à maintenir un poids sain réduit le risque de cancer du côlon, du pancréas, de l’utérus et de l’œsophage. Mais il y a aussi ces autres types de cancers, qui nous frappent par malchance. Parmi les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé figure également le fait de « participer à un dépistage de la population ». 

Ce que le docteur Dr Colemont n’a d’ailleurs de cesse de répéter : « une bonne hygiène de vie, ça aide, mais ce n’est malheureusement pas une solution miracle. Je connais des personnes de 51 ans qui ont respecté tout cela scrupuleusement. Mais qui ont quand même eu un cancer de l’intestin. Nous devons donc tous être vigilants : 20 % des patients atteints d’un cancer du côlon ont plus de 74 ans. La maladie touche aussi de plus en plus de jeunes également. Or ces derniers n’ont pas droit à ce test gratuit. Ils doivent donc se surveiller eux-mêmes. En fait, nous devrions traiter notre organisme comme nous traitons notre voiture : procéder à un contrôle chaque année. » 

Le manque d’information

« Longtemps, nous avons pensé que les gens ne se soumettaient pas au test par crainte du résultat. Or, une étude italienne indique que le manque d’information en est l’une des principales raisons. Moi aussi, j’entends souvent : ‘personne ne m’a jamais dit que c’était si important.’ Notre budget pour la prévention et la communication doit donc être revu à la hausse. Une étude récente d’Eurostat montre que la Belgique pourrait mieux faire en la matière : la prévention représente 1,7 % de notre budget santé. Alors que la moyenne européenne est de 2,8 %. Ce n’est pas ainsi que nous y arriverons. C’est pourquoi, avec notre ASBL Stop Darmkanker, nous continuons à nous concentrer sur des conférences et des webinaires. Aussi sur des actions et des campagnes sur les réseaux sociaux. »

Espoir dans les innovations technologiques

Pourtant, le Dr Colemont ose rêver d’un monde dans lequel le cancer de l’intestin se fera rare. Et ne sera plus une cause de mortalité. « Les innovations technologiques peuvent nous y aider. On parle par exemple déjà d’une toilette intelligente dotée de capteurs capables de détecter du sang invisible à l’œil nu dans les selles et de mesurer les sucres et les protéines dans l’urine. Mais tant que tout le monde n’en disposera pas. Nous continuerons à compter sur le dépistage gratuit de la population. Donc, je le répète : faites – le – test ! »

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