maladies
Opinion

Pourrons-nous venir à bout des maladies de notre époque ?

16.03.2023
par Bastien Craninx

Certaines maladies sont plus fréquentes que d’autres. Le cancer du poumon, le burnout et la maladie de Crohn ont ainsi acquis une forte incidence. Quelle est la situation et que peut-on espérer pour l’améliorer ? Réponse ci-dessous. 

maladieDr Berghmans
Professeur en oncologie thoracique à l
Institut Jules Bordet, Hôpitaux Universitaire de Bruxelles

En quoi cette maladie est-elle si répandue en Belgique ?

« Le cancer du poumon est le second cancer chez lhomme et le troisième chez la femme en Belgique. Cest la première cause de mortalité par cancer au niveau mondial dans les pays industrialisés. Les taux restent dailleurs relativement constants même après la pandémie, peu importe l’âge et le sexe. Cela reste une pathologie du sujet plus âgé (médiane entre 65 et 67 ans) avec une augmentation chez les gens plus jeunes étant donné quon fume de plus en plus tôt. Ce cancer est principalement lié au tabac. En 2020, 23% de patients ont été considérés comme guéris. Il est également important de noter quil existe plusieurs types de cancers bronchiques. »

Quels ont été les progrès récents dans le traitement de cette maladie ?

« Il y a eu de belles avancées en termes de connaissance de la biologie du cancer. Les nouveaux traitements vont cibler certaines anomalies moléculaires, souvent liées à des récepteurs cellulaires. Le deuxième gros changement concernant d’abord les malades métastatiques sont les immunothérapies. Ça a beaucoup changé les choses. On a réussi à contrôler la maladie sur de longues périodes. Les approches chirurgicales moins invasives et les radiothérapies très ciblées sont également des avancées. »

Que peut-on espérer dans les années à venir concernant le traitement de cette maladie ?

« Il est primordial d’arrêter de fumer tout ce qui contient du tabac : cigarettes, pipe, cigare, chicha… Le dépistage a montré son intérêt pour trouver des cancers à des stades précoces et devrait être intensifié. Les traitements ciblés tout comme les immunothérapies sont dans un continuum et s’adressent désormais à des stades moins avancés de la maladie. Ces traitements se complexifient et nous avons donc besoin de médecins spécialisés dans le domaine. Il y a également toute une série de nouvelles modalités thérapeutiques en cours d’études qui ne sont pas disponibles dans le commerce. Ce sont de potentiels traitements que nous espérons voir disponibles dans un avenir proche. »

traitementStéphanie Delroisse
Psychologue du travail et
professeure à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’UCLouvain

En quoi cette maladie est-elle si répandue en Belgique ?

« Les arrêts maladies pour raisons professionnelles concernent entre 4 et 7% de la population. Cest le mal de notre époque. Le monde du travail est sous pression. Il y a d’abord une pression temporelle chez les travailleurs pour répondre aux exigences du marché. Ensuite, les nouvelles technologies ont envahi notre vie quotidienne en faisant disparaître les barrières entre vie privée et vie professionnelle. Enfin, le collectif a tendance à laisser place au « chacun pour soi » dans les entreprises. Or, quand les exigences professionnelles excèdent nos ressources pendant une longue période, on risque le burnout. »

Quels ont été les progrès récents dans le traitement de cette maladie ?

« La connaissance scientifique du burnout (p.ex., les causes, l’impact sur la santé, etc.) et le fait qu’on en parle dans les entreprises. Pouvoir en parler rassure et isole moins le travailleur qui est stressé. On ne le faisait pas il y a 15 ans. On sait également mieux comment traiter la maladie. Le sommeil, par exemple, est essentiel pour aider à récupérer. Il faut prendre soin de soi, être attentif à son corps, mieux réguler ses émotions. Il faut se reconnecter à soi, savoir qui on est et ce que lon veut dans son travail et dans sa vie de manière générale. Tout ce qui touche à la pleine conscience peut également fortement aider à réguler les émotions ainsi quen termes de prévention. »

Que peut-on espérer dans les années à venir concernant le traitement de cette maladie ?

« La réalité virtuelle promet de belles avancées dans le traitement du burnout. Elle permet de travailler les compétences émotionnelles, cognitives et relationnelles. Le patient sexpose à des situations qu’il redoute, ce qui lui permet d’augmenter sa confiance en lui. C’est utile dans la phase de réintégration au travail, mais également dans la prévention du burnout qui est un aspect essentiel en matière de santé. Il faut également s’interroger sur les questions de sens du travail. Et aussi penser aux aspects de déconnection pour trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. En ce sens, les entreprises vont également devoir revoir leur manière de fonctionner. »

maladiesDenis Franchimont
Directeur clinique des maladies inflammatoires chroniques de lintestin, HUB- Hôpital ERASME

En quoi cette maladie est-elle si répandue en Belgique ?

« La maladie de Crohn et la Colite ulcéreuse sont des maladies inflammatoires chroniques de lintestin (MICI). Elles affectent un ou plusieurs segments du tube digestif, et concernent le plus fréquemment des adultes jeunes dans la deuxième et troisième décade, en impactant durablement leur qualité de vie. Ces maladies affectent 1,5 fois plus les femmes que les hommes. Il sagit de maladies des pays occidentaux industrialisés. Lincidence de ces maladies na cessé daugmenter de manière exponentielle (facteur de 2 à 10) au cours ces 50 dernières années. La prévalence des MICI est actuellement de 0.3 à 0.5% selon les régions du monde occidental. Il sagit dune réelle épidémie mondiale. »

Quels ont été les progrès récents dans le traitement de cette maladie ?

« Les progrès sont liés à une meilleure compréhension de la maladie, au développement continuel de nouveaux traitements mais aussi à une approche plus centrée et globale du patient. La compréhension de la maladie suggère quil sagit dune réponse inappropriée du système immunitaire digestif vis-à-vis du microbiote intestinal chez une personne prédisposée génétiquement à ces maladies. Il nexiste pas encore de traitement curatif mais il existe de nombreuses stratégies de traitements dont lobjectif est la cicatrisation complète de la muqueuse intestinale. Lorganisation des soins aujourdhui adopte une approche de plus en plus multidisciplinaire et centrée sur le patient. »

Que peut-on espérer dans les années à venir concernant le traitement de cette maladie ?

« Lenjeu est toujours une meilleure compréhension du déclenchement/développement de la maladie. Lobjectif aujourdhui est de comprendre le facteur environnemental à lorigine de la maladie, et donc de commencer par une compréhension et caractérisation complète du microbiote intestinal chez une personne en bonne santé ou malade. Il sagit dun réel défi en raison de la complexité inouïe du microbiote. Ce microbiote est extrêmement dynamique, influencé par énormément de paramètres dont lalimentation et contient outre des bactéries, aussi des virus, des levures (champignons) et parfois des protozoaires (êtres unicellulaires), et beaucoup de produits bactériens et alimentaires. »

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