Shifting Economy : Plus qu’une transition, une révolution
Ces dernières années, on parle beaucoup de la shifting economy dans les programmes politiques de certains partis. Mais en quoi cela consiste-il concrètement ? Pour en savoir plus, nous avons posé la question à trois élus qui travaillent chaque jour sur cette question : Alain Maron, Barbara Trachte et Philippe Henry.
Philippe Henry
Ministre wallon du Climat, des Infrastructures, de l’Énergie et de la Mobilité
Sur quels axes de la Shifting Economy travaillez-vous ?
« Je travaille au renouveau de l’économie wallonne, afin d’aboutir à un juste équilibre entre développement social, économique et durabilité environnementale. Je me concentre en particulier, dans le respect de mes compétences, sur les quatre dimensions suivantes : la définition d’un cap en matière climatique ; le renforcement des accords volontaires et des modes de collaboration participatifs ; le financement de la transition, indispensable pour stimuler certains investissements et créer de nouvelles opportunités, et le développement de nouvelles solutions énergétiques afin de donner aux entreprises les moyens de leurs ambitions. »
Concrètement, pouvez-vous nous parler de quelques grandes réalisations de ces dernières années ?
« Le Gouvernement a récemment adopté son nouveau Plan Air Climat Énergie (PACE) de la Wallonie qui confirme l’objectif de réduction de 55 % de ses émissions de gaz à effet de serre wallonnes à l’horizon 2030. Le secteur de la construction est essentiel pour nous permettre d’atteindre nos objectifs climatiques. Dans ce contexte, une stratégie d’orientation et de formation à la rénovation énergétique durable est en cours de préparation. Au niveau énergétique, j’ai renforcé le soutien au secteur des énergies renouvelables. Hautement stratégique et indispensable pour la transition, ce secteur a injecté près d’un demi-milliard d’euros dans l’économie wallonne en 2022. »
Enfin, quels sont les grands défis d’ici la fin de la législature ?
« Le premier concerne la finalisation des accords de branche de troisième génération, toujours en cours de discussion au sein du Gouvernement. Ces accords volontaires permettent aux entreprises de recevoir des aides publiques si elles s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et à améliorer leur efficacité énergétique. Le deuxième concerne la réforme des aides à l’investissement initiée par mon collègue Willy Borsus. Enfin, je terminerai par l’élaboration d’un plan stratégique wallon pour l’hydrogène. Basé sur une dynamique participative avec l’ensemble des parties prenantes de la société, ce plan aura une portée holistique qui englobera toutes les dimensions de la société. »
Alain Maron
Ministre bruxellois de la Transition climatique, de l’Environnement, de l’Énergie et de la Démocratie participative
Sur quels axes de la Shifting Economy travaillez-vous ?
« D’abord, Bruxelles-Environnement a une légitimité certaine sur la transition économique. Par exemple, après avoir mis en place l’Alliance Emploi-Environnement dès 2010. Celle-ci impliquait notamment l’obligation du passif pour toute nouvelle construction. Ensuite, il y a une production de déchets énorme à Bruxelles : 2 millions de tonnes ! Ces déchets sont une mine d’or à valoriser. Réduire l’impact environnemental des entreprises passe par la réduction et la bonne gestion de leurs déchets. Enfin, troisième axe, nous stimulons des filières “Good Food” pour une alimentation saine pour les Bruxellois et les Bruxelloises, et bonne pour la planète. »
Concrètement, pouvez-vous nous parler de quelques grandes réalisations de ces dernières années ?
« Un des soutiens les plus importants est “BeCircular”, qui a permis de financer ces dernières années plus de 230 projets d’économie circulaire sur le territoire Bruxellois. Cela représente plus de 850 emplois créés et un effet de levier de 1 pour 8, c’est-à-dire que pour 1€ d’argent public, 8€ sont investis par le secteur privé. Nous voulons que l’économie circulaire devienne la norme. Vu les tonnes de déchets produits chaque année, nous avons de la ressource à capter et à valoriser pour créer de la valeur sur le territoire régional. C’est bon pour l’économie, pour l’environnement, mais aussi pour l’emploi de toutes et tous. »
Enfin, quels sont les grands défis d’ici la fin de la législature ?
« Avec Barbara Trachte, nous avons mis sur les rails le train de la transition économique avec Shifting Economy, Renolution, Good Food, le Plan Air Climat Énergie… L’enjeu est que personne ne reste à quai, que cette transition soit inclusive et concerne tout un chacun. Les indépendant·es et les très petites entreprises doivent aussi bénéficier de la transition. C’est aussi faire en sorte que les locataires et les petits propriétaires puissent vivre dans des logements rénovés et performants énergétiquement. C’est faire en sorte que la Good Food soit accessible au plus grand nombre et que l’offre de Good Food soit présente dans tous les quartiers de Bruxelles. »
Barbara Trachte
Secrétaire d’État bruxellois de la Transition économique et de la Recherche scientifique
Sur quels axes de la Shifting Economy travaillez-vous ?
« Je travaille plus globalement sur le développement de l’activité économique autour de ces projets sociaux et environnementaux, qui doivent aller de pair. Tout est fait pour réorienter notre action, et cela passe par exemple par une réforme des marchés publics. Cette transition vise toute l’économie bruxelloise, et nous voulons attirer en masse les entreprises vers ces projets. Il y a des opportunités à saisir et les deux crises que nous venons de vivre (Covid et guerre en Ukraine) ont montré que les entreprises qui avaient déjà entamé leur mue avaient mieux résisté que celles qui étaient encore très dépendantes de la Chine ou d’autres pays lointains. »
Concrètement, pouvez-vous nous parler de quelques grandes réalisations de ces dernières années ?
« Nous avons pour projet de créer chaque année un nouveau parc de PME. La demande est très grande, et chaque projet se remplit immédiatement. Quand on parle d’économie, on parle aussi d’argent, et nous avons mis au point des outils pour faciliter l’accès aux financements. Nous avons créé un cadre qui permet aux citoyens d’investir dans des projets ambitieux tout en protégeant leur argent. Il y a aussi tout un volet sur l’accompagnement des entreprises, avec une place importante donnée aux femmes qui veulent entreprendre. Nous avons assoupli les règles d’accès à la profession, ou encore lancé des primes pour encourager la rénovation énergétique. »
Enfin, quels sont les grands défis d’ici la fin de la législature ?
« Au niveau administratif, je pense à l’adoption d’une ordonnance sur l’innovation et les aides aux entreprises. Sur le terrain, nous visons une massification de la shifting economy. Le défi sera de toucher plus que ceux qui sont déjà convaincus par ces questions. On a déjà la chance à Bruxelles d’avoir de nombreuses personnes qui sont intéressées et convaincues par ces thématiques, mais il faut aussi aller toucher ceux qui en sont plus éloignés. Enfin, Bruxelles seule n’a pas tout le levier pour tout faire avancer. Il faudra compter sur le soutien d’autres niveaux de pouvoir en Belgique et même en Europe pour renforcer notre action et apporter plus de justice au niveau économique. »