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Diversité

Les avantages de la neurodiversité sur le lieu de travail

19.07.2023
par Tuly Salumu

Grâce à des séries documentaires telles que Tabous, diffusée sur National Géographic, la neurodiversité se fait connaître. Avant, l’accent était mis sur les problèmes des personnes neurodivergentes. Aujourd’hui, certaines entreprises mettent en avant les talents particuliers de ces personnes trop souvent discriminées au travail. 

TDAH, autisme, haut potentiel, dyslexie ou encore hypersensibilité, la neurodiversité est de plus en plus reconnue dans la société. Le livre d’Adrien Devyver, animateur de la RTBF, On m’appelle la tornade sur le TDAH, a rencontré un franc succès. L’épisode de Tabous consacré aux personnes autistes a attiré pas moins d’un million et demi de téléspectateurs. Cela n’a rien d’étonnant. On estime en effet qu’une personne sur cinq est neurodivergente. Ce terme, inventé par la sociologue Judy Singer, qualifie les personnes dont le cerveau traite les informations et les stimuli différemment de la majorité. C’est invisible mais cela impacte le comportement et la façon de penser. 

Au cours des dernières années, la sensibilisation à la neurodiversité n’a fait que croître. De plus en plus d’enfants sont diagnostiqués. Les parents et les enseignants disposent également de plus d’outils pour les aider et répondre à leurs besoins. Pourtant, en entreprise, on part du principe que tous les employés doivent entrer dans le même moule. « C’est étrange », estime Elise Cordaro, auteure et experte en développement personnel. « Lorsque l’on achète une plante, on en prend grand soin », dit-elle. « On la place dans un endroit choisi avec soin, on l’arrose en fonction de ses besoins. Avec les gens, c’est différent. Vous avez du mal à vous concentrer ? Tant pis : vous travaillerez dans un bureau ouvert, de préférence sans écouteurs au risque de passer pour un antisocial aux yeux des autres. »

Les personnes autistes souffrent de la surstimulation. Elles ont du mal à se réunir en grand groupe et sont plus facilement distraites.

- Magali De Reu, entrepreneuse et experte en développement personnel

Des ajustements en entreprise

À en juger par leurs offres d’emploi, les entreprises recherchent des hommes et des femmes sociables, perfectionnistes, flexibles et disponibles. Les bureaux ouverts, les séances de brainstorming, les déjeuners entre collègues et les after-work sont la norme. C’est une bonne chose si vous êtes à l’aise avec ces conditions de travail. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. C’est pourquoi il est important que les offres d’emploi soient aussi inclusives que possible. « Les personnes autistes souffrent de la surstimulation », explique Magali De Reu, entrepreneuse et experte en développement personnel. « Elles ont du mal à se réunir en grand groupe et sont plus facilement distraites. » Heureusement, depuis la crise corona, il y a un peu plus de flexibilité : le télétravail est davantage autorisé et les réunions en ligne se multiplient. Pourtant, ce n’est pas toujours un atout pour les personnes neurodivergentes. « Travailler à domicile est positif », explique Mme De Reu, qui publiera bientôt son livre All autcasts. « Mais cela crée aussi beaucoup de malentendus. Les personnes autistes ont du mal à interpréter les expressions faciales et le langage corporel. Sur un écran, c’est donc plus difficile. »

Il n’y a pas de règles standard pour les personnes neurodivergentes. Il est donc préférable que les employeurs demandent à leurs employés ce dont ils ont besoin. Il existe néanmoins des aménagements qui peuvent s’appliquer à une majorité de personnes et faciliter le travail et la cohésion du groupe. Un horaire de travail plus court, moins de réunions et une limitation du nombre de personnes participant aux réunions, par exemple. 

Cela peut sembler contraignant, mais de tels ajustements font toute la différence. Attention toutefois à ne pas susciter la jalousie chez les collègues. « C’est pourquoi il est important que l’employeur lui-même soit à l’origine de cette initiative et qu’il en informe personnellement ses employés », explique M. De Reu, qui organise des formations pour sensibiliser à la neurodiversité. 

« Je suis très heureuse que mon employeur répondent à mes besoins », déclare Cordaro, qui travaille comme spécialiste du marketing en ligne. « Je peux travailler avec des écouteurs. Il faut que je sois dans ma bulle sinon je me déconcentre trop vite. Les bureaux flexibles, ce n’est pas mon truc. Je suis la seule à travailler sur un ordinateur fixe. Et sur mon bureau, il y a une note qui demande amicalement de remettre mes affaires à leur place (rires). Il est important que les réunions soient annoncées à l’avance et qu’elles commencent à l’heure. Je me rends toujours dans la salle de réunion un peu en avance afin de pouvoir m’asseoir sur ma chaise habituelle. »

Structurer un environnement chaotique

Lorsque leurs besoins spécifiques sont pris en compte, les talents des personnes neurodivergentes s’expriment. « J’ai le souci du détail et je sors très facilement des sentiers battus », déclare Cordaro. « Par conséquent, j’ai des idées différentes de celles de mes collègues. » Elle est également très douée pour l’automatisation.  « Je peux prédire le déroulement de certains processus car je mémorise facilement toutes les tâches que nous avons effectuées dans le passé. À partir de là, je crée des tableaux Excel. J’aime les systèmes qui rationalisent le travail, afin de ne pas repartir de zéro à chaque fois. Mon ancien directeur m’a dit que j’étais douée pour structurer un environnement chaotique. »

Les adaptations destinées aux personnes neurodivergentes profitent également à leurs collègues neurotypiques. « Dans une certaine mesure, tout le monde a besoin de moins de stimuli et de plus de calme », explique Mme Cordaro. « Mais la plupart des gens ne s’en rendent pas compte. C’est pourquoi les personnes neurodivergentes sont les canaris dans la mine de charbon. Ce qui fonctionne bien pour nous fonctionne aussi pour nos collègues. »

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