jardins poussiéreux
Maison

Jean-Philippe Teyssier : Pour la fin des jardins poussiéreux !

05.10.2020
par Fokus-online.be

Je dois vous avouer, avant toute chose, être un jardinier moyen, et parfois même médiocre. Mais j’aime ça ! 

Un beau jardin ça s’entretient. Au risque d’enfoncer des portes ouvertes, je dirai que l’amour et la passion sont les premiers outils du bon jardinier. Il faut ensuite concevoir son jardin en fonction du temps qu’on peut lui consacrer. Et enfin, choisir des plantes qui s’adaptent au climat et au sol du jardin. Mais ce sont là des considérations bien trop pragmatiques et mes conseils s’arrêteront là.

L’imperfection est une forme de perfection

Un jardin, ce n’est pas comme les murs porteurs d’une maison : on peut y expérimenter, y échouer et y faire de nouveaux essais. Le jardin parfait doit être imparfait. Je déteste par-dessus tous les « espaces verts » trop nets pour être honnêtes. Les partisans du jardin tenu à la pince à épiler me donnent des maux de ventre. J’aime les jardins qui me débordent visuellement mais avec lesquels je vais trouver un terrain d’entente, grâce à la qualité de leur structure et de leurs allées.

Le cliché du « mamie-savonnette »

Je trouve que le jardin est encore, aux yeux des gens, un sujet trop poussiéreux et suranné. Alors que si on le regarde de plus près, il peut être moderne, culotté, engagé ou complétement punk. C’est lorsqu’on n’y prend pas garde que l’on cultive des clichés : un jardin ne serait-il qu’un lieu toujours fleuri, embaumé de parfums, tiré à 4 épingles ? Un lieu dans lequel on s’ennuierait terriblement ? Ce cliché, je m’amuse à l’appeler le « mamie-savonnette ». Un hommage sarcastique aux papiers fleuris qui recouvraient les savons de nos grands-parents et qui représentaient les jardins poussiéreux idéalisés de l’époque.

Casser les stéréotypes

C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai aimé travailler sur la série Jardins d’ici et d’ailleurs (Arte) : casser les stéréotypes ! Nous avons visité et montré des jardins secs, sans la moindre fleur ; des jardins d’artistes ou de botanistes fous ; jardins religieux ; des jardins à moitié détruits ; jardins qui ont servi de décors à Game of Thrones (Croatie) ; des jardins-cimetières ; jardins d’ingénieurs hydrauliques ; des jardins de béton et de fer ; jardins avec une statuaire militaire, et d’autres encore aux formes extrêmement érotiques.

Un paradis sur terre

La diversité des espèces, des odeurs, couleurs, des formes et l’infinité des jardins poussiéreux possibles en font un terrain de jeux exceptionnel. Réduire le jardin à un « espace vert », c’est oublier que dans ce morceau de terre, on peut imaginer son propre petit paradis sur terre. La majorité des cultures ne s’y trompe pas et partage cette idée de « paradis accessible » : de l’Iran à la Chine, de l’Afrique du Sud à l’Islande. Le confinement a été vécu de manière plus douce chez les propriétaires de jardins ou chez ceux qui avaient accès à la campagne environnante. Quand tout s’arrête violemment autour de nous, Le jardin est un exutoire extraordinaire.

Auteur : Jean-Philippe Teyssier, Architecte-paysagiste, présentateur et réalisateur sur Arte.

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