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Mobilité

Faites place: Vélos, trottinettes ou voitures?

16.11.2019
par Julie Garrigue

La voiture perd son titre de Reine du bitume! C’est ce que montre l’enquête publique sur la mobilité que la Région Bruxelles-Capitale a publiée ce mois-ci. Une nouvelle peu surprenante, tant l’utilisation des trottinettes et vélos a explosé ces deux dernières années. Avec son lot de pilotes de course et de mécontents. Comment retrouver la sérénité de nos rues?

79% des Bruxellois qui ont participé à l’enquête souhaitent moins utiliser leur voiture, au profit d’autres moyens de transport. Comme la marche, le vélo ou les communs. C’est l’avènement de la mobilité douce, qui bouleverse les habitudes urbaines.

Des tensions dans l’air 

Alors que ces nouveaux modes de transport devaient apaiser les routes, des frictions apparaissent. Tant dans l’espace public que sur les réseaux sociaux.

Un cycliste bruxellois a même mis en ligne une pétition pour que cessent l’agressivité et les incivilités… des automobilistes. Il leur reproche de se croire, pour certains d’entre eux, sur « un circuit de course », mettant en danger « les autres usagers de la route, des familles avec des enfants, des piétons, des cyclistes. » À l’autre bout du bureau des plaintes, il y a les automobilistes eux-mêmes. « Les vélos se croient tout permis », « les trottinettes traversent n’importe comment », « on ne pourra bientôt plus se garer avec toutes ces pistes cyclables. » Des phrases banales quand vous posez la question à des conducteurs. Et au milieu de tout le monde, il y a les piétons. Eux dénoncent les voitures qui se garent sur la chaussée, des trottinettes abandonnées devant leur porte. Et des deux-roues à fond les ballons sur les trottoirs.

Non seulement les adeptes de modes de mobilité douce s’inquiètent de leur vulnérabilité vis-à-vis des automobiles, mais ils se disputent l’espace.

Un problème de grosse ville

Les petites villes et villages semblent moins touchés par la nouvelle discorde. Comme le fait remarquer Aurore Couvreur, du Ministère public (Bruxelles). « C’est sûr que c’est un phénomène que connaissent plutôt les grosses villes. Il y a plus de pression automobile et le tissu urbain est plus dense. Ce qui signifie qu’il y a plus de gens à faire cohabiter. » Ces tensions sont difficiles à chiffrer. D’autant que toutes ne finissent pas devant la police ou la justice.

Des fous du guidon

Le commissaire Thierry Vandenhoute dirige le service Trafic et roulage de Bruxelles Capitale-Ixelles. Il ne veut pas tomber dans un discours politiquement correct, où les conducteurs automobiles auraient tous les torts. « Parmi les cyclistes, c’est 50/50. La moitié respecte scrupuleusement le code de la route, et l’autre moitié suit son propre code de la route. Par contre, les trottinettes, c’est la grande catastrophe. C’est du grand n’importe quoi. Il y a de leur part une méconnaissance totale du code de la route. Et donc oui, ça roule sur le trottoir, ça roule sur le passage piéton, ça traverse les carrefours en biais. »

Les sanctions suivent-elles?

Les autorités publiques souhaitent bien sûr favoriser la mobilité douce et la micro-mobilité*. Mais ils doivent aussi garantir la sécurité de tous et empêcher que certains ne partent en roue libre. Pour cela, la police de Bruxelles a mis en place des unités mobiles. « Les brigades à vélo verbalisent bien sûr les comportements scandaleux que pourraient commettre certains cyclistes, explique Thierry Vandenhoute. Mais de façon générale, on essaie d’attirer l’attention sur leur dangerosité. » Ces brigades font donc essentiellement de la sensibilisation. « L’année passée, il y a tout de même eu 800 procès-verbaux et perceptions immédiates qui ont été établies à charge des usagers faibles. »

« La moitié des cyclistes respecte scrupuleusement le code de la route, et l’autre moitié suit son propre code de la route. Par contre, les trottinettes, c’est la grande catastrophe. »

Thierry Vandenhoute, commissaire de police

À Liège, il n’y a pas encore d’unité spécifique. Mais pour Arnaud Lombardo, secrétaire de cabinet pour l’échevin de la mobilité, ce n’est peut-être pas nécessaire. « Quelqu’un qui devient un cycliste au quotidien n’aura peut-être pas les bons réflexes au début. Donc il faut sensibiliser la population à respecter les autres usagers. (…) À partir du moment où il y a de plus en plus de cyclistes, ça devient un réflexe de faire attention. »  Une question d’habitude donc.

Urbanisme: adapter la ville

Les modes de mobilité ont muté plus rapidement que ne l’ont fait les mentalités et l’espace urbain. Les routes et les rues ont d’abord été imaginées. Pour deux usagers les voitures et les piétons. Benoît Godart (VIAS) retrace l’évolution de nos rues. « Au début, on avait les voitures, puis les vélos. On a ajouté les vélos électriques, et puis les speed Pedelec. Maintenant, il y a aussi les trottinettes. Je pense qu’il y a un problème de partage de l’espace disponible, d’où la nécessité dans les années qui viennent d’agrandir les pistes cyclables, qu’il y en ait davantage. »

Ce qu’on confirme au cabinet de la mobilité de Liège. « La clé, c’est le développement des infrastructures. Puisque si on a des infrastructures adaptées, c’est plus facile pour chacun des modes de transport. » Les transformations sont prévues selon le porte-parole de l’institut de la sécurité routière. « Le Gouvernement wallon a annoncé dégager plusieurs millions pour aménager des pistes cyclables, c’est pareil à Bruxelles. Mais quand on parle d’infrastructures, il ne suffit pas d’un coup de baguette magique, il faut plusieurs années. »

* Micro-mobilité : moyens de déplacement individuels, légers, compacts et portatifs, pour de courtes distances.

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